Enfant, perché sur les épicéas des forêts alpines de Belledonne, je passais des heures à guetter les allées et venues des oiseaux dans les nichoirs que j’avais mis en place. Le temps s’arrêtait, je me fondais dans les sons et les odeurs de la forêt, je faisais corps avec les arbres et les animaux, jusqu’à ne faire plus qu’un avec la nature. Tout sentiment de séparation s’estompait : il n’y avait plus un individu, Thierry, qui observait des phénomènes extérieurs à lui, il y avait juste une écoute vibrante, une présence intense à la vie qui se manifestait à la conscience.

Des années plus tard, avec l’éclairage des traditions spirituelles dans lesquelles je cheminais, j’ai réalisé que j’avais vécu, dans les forêts de mon enfance, les premières expériences d’ouverture, d’éveil spirituel. Ce vécu spontané d’unité au contact de la nature, que j’ai retrouvé ensuite dans la rencontre amoureuse, dans l’émotion artistique, dans mon travail intérieur thérapeutique, dans les explorations chamaniques, et dans mon cheminement spirituel, avait laissé une empreinte indélébile au plus profond de mon être, un pressentiment de ma vraie nature que j’aspirais à retrouver et qui me guide encore aujourd’hui dans chacune de mes explorations.

Ma curiosité scientifique d’ingénieur, mon goût pour l’investigation intellectuelle et la démarche empirique m’ont emmené par ailleurs à remettre radicalement en question ma conception du monde, jusqu’à la faire coïncider avec mes révélations d’enfance : la rencontre avec l’énergétique traditionnelle chinoise lors d’un long séjour à Pékin en 1987 et 1988, mon engagement pour l’écologie au sein du WWF où j’ai travaillé pendant 8 ans, la lecture assidue des ouvrages de physique quantique, la découverte enthousiaste de l’approche intégrale de Ken Wilber, m’ont conduit à prendre conscience que :

  • L’intégralité du monde est fait de conscience et d’énergie (ou de vie, ou d’amour selon la terminologie employée)
  • Tout est en interrelation avec tout, rien n’est séparé, le monde est unité.

Cette vision du monde, que je qualifierais d’éco-spirituelle, ne fait que confirmer dans un langage moderne les cosmologies des spiritualités originelles (chamanisme, tantrisme, taoïsme,…). Elle pulvérise la vision cartésienne, issue des religions judéo-chrétiennes, selon laquelle l’homme, seul être conscient de la Création, est séparé de la nature, qui est elle-même désacralisée, chosifiée, pour être mieux dominée et exploitée, le tout conduisant à l’impasse de la crise écologique actuelle et au mal-être contemporain où le corps et l’esprit sont vécus comme deux entités séparées.

Comment retrouver cette réalité d’un monde de conscience, d’énergie et d’unité ? Comment incarner dans le quotidien cette vision du monde, de la nature, de l’humain ? Comment faire se rejoindre une démarche de développement personnel, une cheminement spirituel, et un engagement écologique ? Comment vivre de façon éco-spirituelle ?

Pour ma part, j’ai ressenti la nécessité, il y a plus de dix ans, de revenir habiter dans la nature, près des forêts de mon enfance, et de construire à Theys une maison et un mode de vie en adéquation avec mes convictions écologiques. Ce retour aux sources, raconté dans le livre « Journal d’une construction écologique » (Editions Minerva), a trouvé ses racines et sa motivation dans une démarche intérieure approfondie qui m’a amené à me reconnecter à ma vraie nature spirituelle, et à retrouver la dimension sacrée de la vie.

Cette démarche intérieure est passée dans un premier temps par un travail thérapeutique psycho-corporel, en séances individuelles et par une formation professionnelle en somatothérapie (accompagnement psycho-corporel par le toucher) auprès de l’Ecole du Corps-Conscience.

Ce travail thérapeutique s’est prolongé par un travail énergétique avec le Qi Gong et le Tai Ji Quan, que j’ai pratiqué pendant dix ans avec Serge Augier, et que je continue à explorer aujourd’hui avec Linda Bijtebier (Qi Gong médical selon l’approche de Jerry Alan Johnson) et David Florentin (Tai Ji Quan style Chen dans la lignée de Maître Wen et Maître Chen Zhenglei).

Sur le plan spirituel, la rencontre en 1996 avec Daniel Odier et le Shivaïsme tantrique du Cachemire a été déterminante et m’a amené à opérer là aussi un « retour à la Source » radical, qui s’approfondit et s’intègre encore aujourd’hui auprès des enseignants de cette merveilleuse tradition : Daniel Odier, Eric Baret, Nathalie Delay.

Ces explorations m’ont amené à une vision globale que j’ai nommé les « huit aspects du vivant », qui synthétise, selon mon expérience, les aspects par lesquelles la conscience universelle se manifeste et s’incarne dans l’être humain. J’ai développé en détail cette vision dans le livre « S’unir au vivant » (Flammarion, 2020).